"Enzo Cormann, le mouvementeur" - Numéro hors-série
Autoportrait, articles récents, conférences, jazz poem inédit, bibliographie...


2010 |

 

De la figure du « Mouvementeur » forgée par Jean Dubuffet et dont le concept s’accorde si bien avec le projet artistique d’Enzo Cormann, ce dernier dit ceci : « Le dramaturge-mouvementeur s’en prend à l’immobilité des consciences, et à la fixité des représentations qui servent si bien les faiseurs de guerre. On n'attend pas de lui qu'il produise une vision du monde, mais ce mouvement spécifique de l'examinateur tournant en tous sens un objet sous la lampe, afin de permettre à l'assemblée des “individus pensant” de réexaminer telle représentation donnée pour définitive. Car le temps du théâtre est entre autres le temps de la suspension provisoire du jugement (à tout le moins du pré-jugé) au profit d'un mouvement de pensée, aiguillonné par la fiction ».
Il ne nous échappe pas que ce dramaturge-mouvementeur coïncide au plus près avec le portrait de notre dramaturge ; et que l’examen préconisé – dont on comprend qu’il est une recommandation à soi-même : tourner incessamment son objet sous la lampe plutôt qu’arrêter son jugement –, s’applique à l’ensemble de cette œuvre en mouvement, tant celle du dramaturge que celle du poète, du romancier ou de l’enseignant. Est-il nécessaire de dire que ce présent dossier, engagé sous le signe du portait, ne s’entend pas comme une juxtaposition susceptible d’accrochage, mais qu’il voudrait plutôt rendre compte d’une vaste mosaïque, ô combien métissée et ô combien mouvante et en devenir ; soit, d’une œuvre à multiples facettes, touffue et exceptionnellement variée.
Car il s’agit bien d’un portrait qui n’est pas à saisir ; le seul site de l’auteur nous en convainc2 : c’est une figure qui apparaît, disparaît et qui tourne, et d’où part un faisceau de directions et de sous-directions au nombre de lignes pour le moins très fourni.
C’est donc un nombre inattendu de destins qui nous est offert, et, à l’examen de ce foisonnement artistique, l’artisan « chaosmique », tel que l’auteur se nomme volontiers, mi-sérieux, mi-espiègle, tournant encore la tête vers son maître et ami Félix Guattari, est un homme perpétuellement curieux, qui invente ses propres outils, défriche ici une nouvelle voie, ouvre là un nouveau chantier.
Et pourtant tout se tient, tout part de sa figure et revient, abonde en nouveautés, reflète à l’infini un monde extraordinairement composite. Le terme deleuzien de rhizome désigne très à-propos ce jardin foisonnant, à la fois singulier et très soucieux de l’autre. Car l’œuvre dans sa quête est entièrement tendue vers l’épreuve du miroir et de l’altérité.
À cet obsessionnel souci de l’autre, que l’on retrouve tant dans l’œuvre artistique que dans l’œuvre pédagogique de Enzo Cormann, il était légitime que l’on rencontrât pareil souci pour son œuvre aujourd’hui très importante. Notre dossier, non affranchi des choix subjectifs, forcément fragmentaires qui l’accompagnent, est ainsi l’occasion de réunir et de rendre visible l’exemplaire diversité du travail et des formes. Outre un jazz poem inédit, Le Dit de la chute, Tombeau de Jack Kerouac, et un album original, manière d’autoportrait conçue tout spécialement pour ce numéro, la première partie du dossier contient des articles et des conférences de l’écrivain lui-même ; la deuxième partie, quant à elle, rassemble un nombre d’entretiens, d’articles et de témoignages de nature à traduire le mouvement novateur de cette œuvre complexe.

Christina Mirjol
Contributions diverses (Sarrazac, Françon, Bost, Mirjol, Péju, Mayorga, Padovani, Le Pors, Garcia, Melquiot, Piemme, Sales, Gallet, Fayner...)

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206p - 18,50€ - ISBN 978-2-87854-493-0